Intro : Crises financières, manipulations comptables, un contexte difficile pour analyser et investir dans une entreprise : autant de raisons qui ont poussé les investisseurs et les analystes financiers à réclamer l’avènement d’un référentiel comptable international. Suite à la crise de 2000 (ENRON et WORLDCOM (manipulations comptables)), l'Union Européenne a décidé d'améliorer l’homogénéité et la comparabilité des états financiers des entreprises de la zone en créant un référentiel comptable commun. C'est le règlement européen du 19/07/2002 qui a imposé l'application des normes comptables internationales IFRS elle-même établit auparavant par l’IASB (International Accounting Standard Board).
Parallèlement, les banques centrales se sont organisées depuis 1974 dans un groupe de travail connu sous l’appellation de comité de Bâle avec pour but de favoriser l’harmonisation des règles et pratiques de contrôle des opérations bancaires. Ceci à la suite des perturbations provoquées par la faillite de la banque Herstatt ayant provoqué un effet « domino » sur certaines autres banques. Le comité de Bâle multiplie les recommandations visant à assurer la stabilité du système bancaire international en fixant un seuil minimal aux fonds propres des banques.
Ainsi, entre IFRS et Bâle, quelles sont les principales convergences et divergences ?
I. Les points de convergences :
1. Améliorer la transparence :
- Les normes IFRS pour les entreprises côtées imposent d’élaborer un jeu unique de normes comptables financières compréhensibles et acceptées dans le monde entier sur la base de principes clairement articulées. Ces normes sont élaborées par l’IASB (International Accounting Standards Board). Le référentiel IFRS est essentiellement tourné vers les utilisateurs de l’information financière : les investisseurs et les analystes pour leur apporter plus de transparence et la comparabilité.
- Le pilier 3 de Bâle II vise à promouvoir une discipline de marché à travers un ensemble de communications financières, permettant aux acteurs du marché d’évaluer l’adéquation des fonds propres d’une banque. Transparence et l’exhaustivité de l’information.
2. Cartographie des risques :
- L’une des principales activités des banques est la fourniture de crédits aux particuliers, professionnels, entreprises et collectivités. Ce métier comporte un risque de défaillance de l’emprunteur. Le comité de Bâle préconise aux banques de la mise en place et le perfectionnement des outils permettant d’évaluer, de mesurer, de contrôler, et de suivre les risques liés au crédit (Bâle II pilier 2). De son côté IFRS, oblige les entreprises à donner les informations en annexes comptables afin de permettre aux investisseurs de mieux cerner les risques.
- IFRS tente de mieux faire apparaitre une détérioration du risque crédit dans le niveau de provision et les évolutions liées à Bâle III visent à améliorer la couverture et la gestion du risque crédit.
- Bâle II et III utilisent la notion de « perte estimée », la norme IFRS 9 également.
Ces 2 points apportent une meilleure lisibilité de la santé financière des entreprises mais les objectifs des normes IFRS et de Bâle restent différents et créer des divergences que nous allons aborder en 2 sous- parties la couverture des risques crédits et les exigences en fonds propres.
II. Les divergences :
1. La couverture des risques crédits :
- En norme IFRS, le risque crédit doit être provisionné seulement en cas de risque « avéré » et les provisions couvrent les pertes encourues. Les pertes encourues (IFRS) correspondent à des événements passés montrant que l’entreprise va subir une perte dans le futur.
- Selon Bâle II, les provisions doivent couvrir les pertes « attendues ». Les pertes attendues sont des pertes anticipées, même en l’absence d’éléments tangibles.
- IFRS s’efforce de proposer un référentiel identique pour améliorer la comparabilité entre chaque entreprise tandis que Bâle II incite les banques à avoir une approche plus fine du risque crédit en ayant recours à un système de notation interne plutôt que d’utiliser la formule « standard ».
2. Les fonds propres :
- Norme IFRS intégration de la « juste valeur » (fair value). Les normes IFRS remettent en question les principes comptables de base. En effet, la comptabilité "traditionnelle" enregistrait l'acquisition d'un bien et ne revenait sur cette valeur dites "historique" que lors de sa cession. Aujourd'hui le principe de la juste valeur oblige, si l'on en a connaissance, à enregistrer une éventuelle perte afin de montrer aux investisseurs et analystes la réalité économique du patrimoine de l'entreprise.
- Pour les banques une norme spécifique pour les instruments financiers : IAS 39 L'IAS 39 permet de comptabiliser au bilan la variation de la valeur des instruments financiers par rapport au dernier arrêté. C’est-à-dire : actifs ou passifs à la juste valeur par résultat et donc soumis aux variations du marché.
- Bâle II exige un minima de fonds propres ( en 2014 8% allant jusqu’à 10,5 % en 2019) afin de prévenir les risques de crises alors que le référentiel IFRS modifie le niveau de capitaux propres en intégrant des éléments valorisés à de juste valeur. Par exemple la titrisation des crédits les fait passer en comptabilité hors bilan et limite de besoin en fonds propres des banques pour provisionner le risque.
- Cette base de juste valeur implique la modification des capitaux propres au gré de la valorisation des instruments financiers. Alors que Bâle préconise le renforcement des capitaux propres dans le but d’apporter la stabilité des banques faces aux crises.
En conclusion, L’IFRS et Bâle ont la même vocation de créer une cohérence internationale afin de clarifier et d’assainir les interactions internationales. Le comptable et le réglementaire continuent à faire évoluer les processus afin d’éviter de nouvelles crises. En effet, même si le référentiel IFRS a été adopté par la majorité des pays, le principe de la « juste valeur » fait toujours débat car il induit la volatilité du résultat des entreprises et pourrait favoriser la pro cyclicité. En réponse l’IASB a achevé sa réponse à la crise financière en 2014 en publiant la version finale de la norme IFRS 9 – Instruments Financiers qui vise à résoudre les difficultés liées à l’IAS 39 (applicable au 1er janvier 2018). Pour pallier au risque de volatilité, Bâle III répond en préconisant d’ajouter aux fonds propres des banques, des coussins supplémentaireS dont le coussin contra-cyclique de 0 à 2,5% dans le Core tiers two. Le monde de l’entreprise étant en perpétuelle évolutions ce jeu de ping-pong continuera encore pour exemple l’arrivée prochaine de Bâle IV et ses travaux sur les ratios…